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Communauté de communes du Minervois au Caroux
[Objectif R - juin 2021] Rendre à la terre : dans le jardin de Jeannot à Riols

Rencontre avec Jean Arribaud, jardinier à Riols


Rendre à la terre

Rencontre avec Jean Arribaud, dans son jardin à Riols

Jean Arribaud habite Riols. Il y cultive un jardin, admiré de tous et toutes. Habitué des articles dans la revue Rustica, ou des reportages télé, il a accepté de nous recevoir. Passionné par le jardin et le travail de la terre "comme le faisaient les anciens", il partage avec nous quelques connaissances et astuces, et son rapport à la terre.

Evidemment, vu la période, on commence en parlant "plants de tomates"


Combien avez-vous de variétés de tomates ?

Une vingtaine. Il y a des tomates traditionnelles, là ce sont les tomates de couleur, et là-bas ce sont des tomates anciennes, dont une variété que j’ai créée qui s’appelle « la géante de Bellevue »  Ce n’est pas une tomate avec un très grand goût, c’est une tomate qui devient grosse, par contre elle est très bien adaptée pour faire des tomates farcies surtout , elles tiennent très bien à la cuisson. Mais j’ai mis 10 ans pour repolliniser, parfois, elle fait des erreurs, j’ai mis 10 ans pour la stabiliser. Elle a été repolllinisée avec des tomates italiennes.

Avec le printemps un peu bizarre, vous avez eu des problème, arrêt de croissance … ?

Non au contraire, malgré qu’il a pas fait chaud, le jardin est plus joli , les plantes n’ont pas souffert du soleil quand je les sors de la serre.

Est-ce que vous faites du compost ?

Oui, bien sûr, par contre, je ne m’en sers pas pour le mettre dans le jardin. Le compost je m’en sers pour faire les semis, les 1ers repiquages, ça marche très bien. Ça nourrit bien les plantes, ce n’est pas trop fort. J’en ai pas assez pour le mettre dans le jardin, il y a les poules !

Dans mon composteur, j’évite de mettre des plants malades, pour ne pas avoir de maladies dans le compost.

Après c’est très bien le compost, j’en ai pas assez pour tout le jardin, je l’utilise dans mes lasagnes : au départ il y a des grosses bûches, et après de plus en plus petites, après les déchets verts, bruns, on finit par la terre qu’on a enlevée et qu’on remet dessus et on la réamende avec du compost ou du fumier.

Jean Arribaud

photo de M. Arribaud dans la lasagne avec couche de compost



Vous voyez comme ça s’est décomposé. Il commence à y avoir les toutes 1ères pommes-de-terre dessous. On commence à les voir. Vous voyez, la terre est magnifique et elles se plaisent les pommes-de-terre. (elles sont sous le compost recouvert de paille) Quand je dis aux gens

Dans les lasagnes, je fais parfois 4 cultures différentes, je mets en bas les salades, des aubergines, on va enlever les pommes-de-terre, on va mettre les salades d’été et là-bas je mets des pieds de melon, les melons, je vais les faire monter dessus, je vais les faire courir, ils vont me faire de l’ombre pour les plantes qui sont dessous, parce que l’été le soleil tape fort.

Pour le fumier, j’utilise le fumier de bergerie d’Etienne Pouly. Regardez comme la terre est belle, elle est noire et dès qu’on gratte, on trouve des vers de terre, regardez, ils sont en train de bien travailler et nous aider à avoir de beaux légumes, cet été !

C’est un jardin où il n’y aucun produit chimique de synthèse sur les plantes.


Vous disiez que vous ne mettez pas les plants malades au compost ?

Non, je les évacue autrement, il peut y avoir sur les plants malades, des spores qui peuvent rester dans la terre pendant des années. Je veux que mon compost soit le plus sain possible. Je veux que mes petits-enfants, quand ils viennent dans le jardin, puisse prendre quelque chose et le manger directement, sans avoir besoin de le laver.

Là je plante les fleurs, des belles de nuit, des belles de jour, y’ les capucines que je fais monter sur les tuteurs, les capucines qui vont faire un peu d’ombrage aux tomates et les protègent des pucerons, ça marche très bien. Là c’est la jachère pour les insectes, toutes les fleurs mellifères vont revenir pour nourrir tous les insectes du jardin, les bons et les mauvais. En plantes spontanées, j’ai du sarrasin (que j’avais planté une année). Les plantes vont revenir à leur rythme pour nourrir tous les insectes les bons et les mauvais. S’il n’y a pas de mauvais, les bons n’auront rien à manger, il ne faut pas tout détruire, il faut qu’il y ait un point d’équilibre, j’appelle cela « la part des anges », c’est la part qui part pour les insectes, pour les prédateurs, c’est comme ça, il faut accepter.

Après, ici, il y a tout un tas, où je laisse sauvage, je laisse pousser, il y a des herbes, des chardons, toujours pour que les insectes puissent se nourrir.

Là aussi il y a une lasagne, avec du broyat et je mets directement les pommes-de-terre dans le broyat. Regardez cette terre, dessous ça va se décomposer, le broyat va se décomposer avec la paille, les pommes-de-terre se plaisent très bien sous la paille. Regardez comme tout est en bonne harmonie.

Elles sont abritées du vent du nord.

Tout est calculé. Chaque plante a un emplacement précis qui est réfléchi. Vous voyez les plantes basses qui sont derrière les tomates, parce que les tomates vont faire de l’ombre à ces plantes qui ont besoin de beaucoup moins de soleil que les tomates qui sont devant, en particulier, les courgettes ; Après les petits pois, on va les enlever. les oignons, les échalotes, qui ont beaucoup moins besoin de soleil, on les met à l’ombre des tomates.

En début d’année, je fais le plan du jardin , je regarde l’année avant où étaient placées les plantes et où je vais pouvoir les remettre l’année d’après. Y’ a des plantes qu’on met les unes après les autres, on ne les plante pas toutes en même temps. Il faut garder l’emplacement pour pouvoir mettre derrière une autre culture, ou mettre à côté une autre culture.

Le jardin, il fait 100m2, il fait pas plus, tous les ans, je fais un plan, je mesure les planches, qui font 23 cm, je mesure les rangées, les écarts entre les plants…

Ça fait 17 ans que je m’occupe de ce jardin. Au début j’y comprenais rien, je suis 100% autodidacte, le jardin c’est pas quelque chose qui m’intéressait, moi j’ai fait 44 ans de génie climatique. Quand on a acheté, il y avait la maie, la mère de mon épouse, qui faisait le jardin,  et je la voyais, elle montait l’arrosoir et la mamie, elle prenait de l’âge, elle avait 80 ans et elle montait et un jour je lui ai proposait le morceau de terrain qu’on avait acheté plutôt que faire le jardin en haut.

Elle a dit d’accord, on a tout débroussaillé, il restait des vieux cerisiers, tout était envahi de ronces, et la mamie, je lui avais arrangé un morceau et elle faisait ses plants ici et de temps en temps je regardais ce qu’elle faisait et j’ai commencé à faire. 

Et comme Obélix qui est tombé dans la potion magique quand il était petit, Jeannot il est tombé dans le jardinage quand il était grand. 

Et de fil en aiguille c’est parti, encouragé par les gens. « Jeannot tu fais un beau jardin », non, je fais un jardin comme faisaient les anciens.


Vous avez toujours eu ce goût pour la précision, le souci d’économie d’eau ?

Ah ça, l’économie d’eau, c’est mon dada, même quand je faisais le métier, on essayait toujours de trouver des systèmes ou des combines pour avoir des réducteurs d’eau, on cherchait à utiliser le moins d’eau pour la même fonction. Je me rappelle, à l’époque, on avait des chasses de 10 litres d’eau, et on trouvait des chasses de 6 litres, ça c’était mon truc.

C’est mon fil rouge, j’ai la fibre de l’économie d’eau et du respect de la nature.


En 17 ans, vous diriez que vous avez évolué sur quoi ?

J’ai évolué sur les techniques mais surtout, utiliser les plantes autochtones, le plus de plantes  autochtones dans un pays, essayer de trouver des plants avec des maraichers, des plants parfaitement adaptés au climat, je me suis beaucoup intéressé à cela. Par exemple, l’oignon, c’est l’oignon de Francis Marsault (Marceau ?), il a les graines depuis 100 ans. Les pommiers que j’ai, qu’on va regreffer l’an prochain, que j’ai greffé là-bas, c’est la rainette de Marceau . Je suis aller récupérer des pommes sauvages, dans la nature, je fais pousser le pommier, greffer et on a vraiment la rainette de Marceau qui est endémique. C’est une toute petite pomme, très parfumée, maintenant elle a disparue parce que les gens.

Au début Francis, quand il faisait ça avec ses parents, il faisait 10-12-15 tonnes de pommes et dans les années 50 il a commencé à y avoir la Golden qui est arrivée, qui est une pomme plus grosse, et puis les supermarchés sont arrivés et la rainette de Marceau a pratiquement complètement disparue. Il lui reste 4 arbres là-haut. Cette année, j’en ai greffé pas mal et donc je les ai donnés à des gens, dans des vergers un peu conservatoires, pour conserver cette mémoire, qui autrefois, a fait vivre des familles entières pendant plusieurs générations, et ça c’est mon truc. A force d’avoir des semences stériles, aujourd’hui, on ne peut pas les reproduire, parce que les semenciers se gavent là-dessus, peut-être on sera contents de retrouver des pommes qui ont été typiques au pays, qui ont bien fonctionné au pays, notamment avec le changement climatique.

Pour l’eau, j’ai les oyas https://www.facebook.com/rustica.fr/videos/141929433684444

et un système de goutte-à-goutte.Le goutte-à-goutte, je le mets au début et après j’arrête, c’est plutôt en fonction des besoins, pour les semis des fleurs, pour qu’au début ce soit toujours humide.

Là ce sont des haricots de variété Pongo. Les pongo ce sont des haricots que j’avais mis au jardin l’an dernier, j’avais fait les conserves et  j’avais récupéré les graines. Ces 2 rangées de haricots ont été semées le même jour, et ceux-là sont des haricots du commerce, là ce sont les haricots qui sont nés ici, et ici du commerce, regardez la différence, ceux-là sont magnifiques et ceux-là, ils vienent du commerce j’étais à 2 doigts de les arracher et de les enlever. La démonstration est flagrante. Là il n’en manque pas un, ils sont hauts.

C’est pourquoi je dis souvent aux gens, faites vos graines, essayer d’avoir vos graines à vous, quand elles se plaisent, récupérer les, elles vont garder en mémoire, l’endroit où elles sont nées. Elles sont adaptées au sol, au climat, là où elles ont vécu, elles se sont plu, on les a récupérées et voilà la démonstration 2.0. Rien à voir. Les autres graines, ce n’est pas régulier, je les laisse mais sinon j’étais à 2 doigts de tout arracher et de mettre les bons.

On le voit comme ça, le jardin, c’est fini, mais c’est quand même, j’y suis tous les jours, depuis le mois de février, depuis les 1ers semis, jusqu’à maintenant, c’est beaucoup de travail.


Comment paillez-vous votre jardin ?

Je ne paille pas la terre tant qu’elle n’est pas à 20 degrés. 

L’an dernier j’avais fait 3 types de paillage : du paillage avec la paille d’orge, du paillage de chènevotte de chanvre et du paillage, qui a très bien fonctionné avec les fougères, qu’on va récupérer dans la nature. 

L’avantage des fougères, c’est qu’on peut faire aussi un purin de fougères, très efficace, comme insecticide. Autrefois, les éleveurs allaient la couper pour faire la litière pour les chèvres. Et c’est très efficace contre les pucerons, c’est une fille qui a fait sa thèse à l’INRA de Versailles, sur le purin de fougères comme insecticide. Ça se décompose, vite, c’est un produit qu’on a sur place, taxe zéro carbone, c’est mon truc, il faut arriver au maximum à être autonome : avoir ses graines, les récupérer.

Tout ce qui vient de la terre, revient à la terre. C’est un cycle, rien ne se perd, rien ne se créé, tout se transforme. Et surtout avoir au jardin, des plantes anciennes et rustiques, qui se plaisent au jardin.

C’est vrai que ce n’est pas facile. Quand on fait ses semis, la difficulté c’est que les plants soient juste prêts quand on va les mettre au jardin et cette année, c’était pas évident… et tout ça est né dans ce que j’appelle la maternité, la salle des naissances et des mariages de graines ( la serre)

Et tout vit en harmonie. C’est vrai que je le densifie à l’extrême pour éviter qu’il y ait des prédateurs, plus le jardin est densifié, moins il y a de prédation, les plantes se protègent mutuellement. Comme pour les pommes-de-terre, si vous faites un grand carré, les doryphores vont les trouver tout de suite, c’est pour ça qu’il y en a là-bas, et là-bas. Les prédateurs sont plus perturbés que sur une seule grande entité.

Toujours semer les carottes avec les oignons, la carotte a des phéromones qui empêche la mouche de l’oignon  et l’oignon empêche la mouche de la carotte. Carottes-oignons est une association qui marche très bien.

sol vivant, chez Jean Arribaud

Et partout je sème des fleurs mellifères. Regardez y’a des champignons qui poussent, c’est signe que le sol est équilibré


Est-ce que vous analysez votre sol ?

Tous les 3 ans, je fais une analyse du sol. J’envoie des échantillons à la Chambre d’agriculture à Carcassonne pour analyser ce qu’il reste comme éléments dans le sol, s’il y a assez d’humus, de phosphore, de potasse, de magnésium…. Le sol est merveilleux. Au début c’était de la terre invivable, c’était de la terre à vigne, y’avait plus rien dans le sol et à mesure de rajouter des amendements, du fumier, et de le travailler. Cette terre a un avantage et un inconvénient, elle est très filtrante, elle est sableuse. Quand on met des intrans, les intrans descendent mais l’avantage c’est que les plantes vont descendre plus pour aller chercher les éléments. Il faut savoir qu’un pied de tomate ça descend jusqu’à 2 mètres, et un radis jusqu’à 1 mètre, avec les radicelles…ça va plonger pour chercher les éléments et l’humidité en profondeur.

Malgré qu’il soit sec, le jardin ne souffre jamais l’été, jamais. Les  plantes vont chercher l’eau en profondeur, les racines vont devoir plonger, il  faut qu’elles se débrouillent après.

Avec les oyas, elles ont de l’humidité en profondeur,

J’appelle ce que je fais de l’agro-écologie.


Comment vous encourageriez d’autres citoyens à se mettre au paillage ou susciter leur intérêt ?

Je ne suis pas un scientifique, je suis un autodidacte, je dis ce que je fais, comment je le fais. Regardez ce que cela donne ! Si vous voulez vous pouvez faire pareil, vous pouvez faire autrement, ça marchera très bien. Je ne vous dirais pas ce qu’il faut faire, je vous dis ce que je fais !

Mon jardin a été 3 fois l’un des plus beaux jardins de France, c’est pas pour rien, c’est un concours national. On est sur des techniques d’économie d’eau, de rotation des cultures, de récupérer ses graines, de faire du paillage, du mulch, d’essayer d’avoir les plantes les plus autochtones possibles,  voilà c’est mon truc à moi.


Et le broyat, vous encourageriez à le faire ?

Oui, c’est super, j’en ai mis pour les cassis et les framboisiers. J’ai broyé les branches de ces arbres, avec l’amabilité de la communauté de communes qui prête le broyeur. Regardez cela se décompose et fait de l’humus, y’a des bois différents, regardez comme c’est frais en–dessous

Il faut encourager au maximum les gens à broyer ce qu’on a sur place et à faire du paillage, plutôt qu’aller à la déchèterie, c’est une hérésie, alors qu’on a les produits sur place. Encouragés par la ComCom, on est 100% gagnant : y’a plus qu’à !

Des fois, les gens ne comprennent pas, ils préfèrent acheter dans des sacs.

Rustica ne viendrait pas prendre des photos du jardin plusieurs fois par an, si ce n’était pas reproductible

 

Pour les courges, je mets des tuiles, je les mets à l’envers au sol, je mets le souffre dessus, le soleil va taper sur les tuiles et le souffre par vaporisation va passer de l’état liquide à l’état gazeux et les cucurbitacés vont prendre toutes ses vapeurs de souffre pour lutter contre l’oïdium. Ça évite de mettre directement sur les plantes et de les stresser. Elles ne vont chercher que ce dont elles ont besoin, et elles ont à disposition le souffre qui se sublime.

Je n’ai pas besoin de traiter le jardin au alors parfois les tomates, quand il y a un risque de avec des huiles essentielles de sarriette ou d’orange. C’est surtout qui embaume le jardin.


Recette préventive contre mildiou et maladies cryptogamiques : 

Pour 1 litre d’eau

- 1 ml (20 gouttes – pas une de plus) d’HE de sarriette ou d’orange

- 5 cl d’une huile neutre, d’olive, de colza

- 5 cl de savon de marseille liquide

 

Pulvériser le matin, quand les plantes font les échanges gazeux. Le matin, sur les feuilles, vous avez plein de petites gouttes, vous croyez que c’est la rosée, non ce sont les plantes qui font les échanges gazeux et liquides, elles ouvrent les stomates, on pulvérise bien par le dessous et dessus des feuilles, cette solution rentre bien dans les plantes et pendant 1 mois vous êtes tranquille, plus aucune maladie, vous pouvez le faire pour les rosiers, contre le mildiou et toutes les maladies cryptogamique.

Et pendant 3 jours, ça sent très très bon dans le jardin.

 

C’est une recette d’un ami de Rustica, jardinier en chef de l’Abbaye de Valsaintes dans les Alpes de Hautes Provence. Ils ont beaucoup de rosiers dans le jardins, qui servent à la distillation et aux grands parfumeurs

 

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Et retrouvez les autres articles d'Objectif R ici

 

 Contact : Service 3D (Développement Durable/Déchets) 04 67 97 90 30 environnement@cdcmc.fr


 

 

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